Prédication du 15 janvier 2012 Temple de Port Royal, Baptême d'Alice, 16 mois.
(en gras, textes choisis par les parents)
Luc 3 : 21
Tout le peuple se faisant baptiser, Jésus fut aussi baptisé ; et, pendant qu’il priait, le ciel s’ouvrit,et le Saint-Esprit descendit sur lui sous une forme corporelle, comme une colombe. Et une voix fit entendre du ciel ces paroles : Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai mis toute mon affection.Marc 3
- Jésus entra de nouveau dans la synagogue. Il s’y trouvait un homme qui avait la main sèche.
- Ils observaient Jésus, pour voir s’il le guérirait le jour du sabbat : c’était afin de pouvoir l’accuser.
- Et Jésus dit à l’homme qui avait la main sèche : Lève-toi, là au milieu.
- Puis il leur dit : Est-il permis, le jour du sabbat, de faire du bien ou de faire du mal, de sauver une personne ou de la tuer ? Mais ils gardèrent le silence.
(fin du chapitre, partie choisie par les parents d'Alice)
Survinrent sa mère et ses frères, qui, se tenant dehors, l’envoyèrent appeler.
La foule était assise autour de lui, et on lui dit : Voici, ta mère et tes frères sont dehors et te demandent.Et il répondit : Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? Puis, jetant les regards sur ceux qui étaient assis tout autour de lui : Voici, dit-il, ma mère et mes frères.Car, quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, ma sœur, et ma mère.
PREDICATION
L'évangile de Marc commence par une description haletante du ministère de Jésus. Ca va vite. Jésus guérit un démoniaque, un lépreux, il fait se relever un homme paralysé, il mange avec des publicains. On l'accuse de blasphème, on accuse ses disciples de ne pas jeûner, comme le faisait Jean le baptiste, et ses disciples, dont il venait de recevoir le baptême.
Les premiers disciples de Jésus traversent un champ de blé, ils ont faim. Ils arrachent des épis de blés. Mais c'était le jour du sabbat. Les pharisiens disent que c'est interdit. Jésus cite une histoire de la Bible qui dit que c'est pas si interdit que ça, et surtout il rajoute que le sabbat a été fait pour l'homme, et pas l'inverse.
Et puis on arrive au chapitre 3, notre chapitre. Là, il guérit un homme , qui a une main sèche, toujours dans le temps du sabbat. Cette fois, il précède l'attaque il dit Est-il permis, le jour du sabbat, de faire du bien ou de faire du mal, de sauver une personne ou de la tuer?
Il s'indigne, dit le texte.
Les foules, venue de partout, le suivent. Elle sentent bien que c'est nouveau. Les gens s'accumulent autour de lui. A tous ces assoiffés, ces demandeurs, ces désespérés, il conjure de ne rien raconter de ce qui est en train de se passer. Mais ça ne sert à rien.
Sur le trajet, dans cette course, il appelle le reste des disciples.
Et puis, les parents de Jésus tentent une première fois de le récupérer. Ils disent qu'il a perdu la raison. Sous entendu que ce n'est pas sa faute. C'est pour protéger leur fils qu'ils disent ça. Ca va trop vite, il y a trop de monde. Trop d'espoir soulevé, trop d'espoir disponible. Trop de bonheur à prendre. Les parents ont peur. Peur des scribes, des pharisiens qui finalement l'accusent de faire l'oeuvre de Satan. Alors il plaide. Il plaide pour que ces gens comprennent ce qui se passe. Pourquoi Satan tout à coup guérirait il des malades ? Pourquoi dévoilerait il cet espoir si profondément enfoncé dans le sol comme un trésor caché ?
Satan se battrait il contre lui même ? Dira Jésus. Les scribes menacent, mais la foule protège, le protège encore. Nous sommes encore au début de l'évangile, qui commence si vite, si fort.
Et on lui signale que ses parents le cherchent de nouveau, pour le récupérer, pour le sauver de lui même. Leur fils est fou, ils le redisent, mais surtout, il se met en danger. Je vous relis donc le passage choisi par Isabelle et Philippe.
- Survinrent sa mère et ses frères, qui, se tenant dehors, l’envoyèrent appeler.
- La foule était assise autour de lui, et on lui dit : Voici, ta mère et tes frères sont dehors et te demandent.
- Et il répondit : Qui est ma mère, et qui sont mes frères ?
- Puis, jetant les regards sur ceux qui étaient assis tout autour de lui : Voici, dit-il, ma mère et mes frères.
- Car, quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, ma sœur, et ma mère.
C'est le point culminant de toute cette course. Une sorte de synthèse. Jésus n'appartient plus exclusivement à sa famille. Il n'appartenait déjà plus au groupe de Jean Baptiste, il n'appartenait déjà plus à cette mouvance des Pharisiens, dont ils partage beaucoup de croyances, mais pas l'essentiel, c'est à dire l'envie de vivre libre. Maintenant, il appartient au peuple, entier, au peuple de Dieu. Qu'il embrasse du regard.
- Voici, dit-il, ma mère et mes frères.
- Car, quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, ma sœur, et ma mère.
Tout est déjà dit en 3 chapitres haletants. Jésus n'appartient plus à personne, il a fondé son école et non il n'a pas perdu la raison. Il s'est libéré de toutes ses entraves et pourquoi faire ? Pour annoncer la parole de Dieu vitale. Celle qui permet de manger, de guérir, de se réjouir et d'être libre. Voici sa nouvelle famille, plus large que la précédente, plus large que la secte de Jean, plus large que son clan.
Dans ces trois petits chapitres, une tempête a surgi. Tout ce qui était bien construit, est appelé à se reconstruire. Toutes les interdictions des scribes et des pharisiens, inapplicables et mortifères sont balayées. Tous ces gens disséminés avec chacun sa dette, sa douleur, sa faim, sa soif s'assemblent. Les foules savent que c'est la parole de Dieu qui vient balayer tous ces codes qui leur faisaient accepter toutes leurs souffrances en silence, ils savent, sentent, que c'est cette parole de Dieu qui vient d'abandonner ses habits démodés, qui vient de se débarrasser de tout cet enrobage légaliste. C'est la parole de Dieu nue, nouvelle, salvatrice et aimante, la même qui a dit à Jésus lors de son baptême : Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai mis toute mon affection.
Que reste t il pour nous , aujourd'hui, à l'occasion du baptême d'Alice, de cette bourrasque, de cette tempête, de cette irruption de la parole de Dieu dans la vie de ce monde antique, si loin de nous et pourtant si proches par ces récits étonnants ?
Quels échos, encore, pour nous aujourd'hui ?
Le baptême chrétien ne s'inspira pas complètement de celui qu'administrait Jean le baptiste, qui pratiquait un baptême de pure conversion, ou, de demi tour vers ce Dieu qu'on n'aurait jamais du quitter. Le baptême de Jean le Baptiste, c'était un baptême menaçant.
La nuance
Le baptême chrétien s'inspire non pas du baptême proposé par Jean à tout le peuple, dont Jésus, mais il s’inspire du baptême qu'a reçu Jésus. Ce n'est pas en fait, le même baptême. C'est comme si entre le baptême auquel j'ai procédé pour Alice, et le baptême qu'elle avait reçu, il y avait un écart, un saut, un saut qualitatif extraordinaire. C'est une nuance. Et quand on veut bien comprendre ce qu'est une nuance, on s'aperçoit en fait que c'est un passage d'un monde à un autre. Et ici, c'est le passage d'un monde ancien à un monde nouveau. C'est une nuance vers l'au-delà de ce monde menaçant dans lequel Jésus demandait le baptême.
Le baptême chrétien s'inspire de celui qu'a reçu Jésus par l'Esprit de Dieu qui en fait son fils . Qui lui dit une parole claire, sans manipulation. Il ne lui dit pas tu es mon fils et donc tu feras ceci ou cela. Il lui dit : tu es mon fils, tu deviens mon fils, et je t'aime. Une parole claire. Vitale. Sans réserve, sous entendu, ou ambiguité.
C'est cette filiation qui fait le sacrement du baptême. Décrire le sens du sacrement n'est pas difficile. Vous mettez un enfant au monde, ou vous adoptez un enfant, et vous êtes sacrément, si j'ose dire, engagé, pour toute votre vie. L'énergie du sacrement est la même, sauf que celui qui s'engage avec vous ne pourra pas se désengager. A ce moment là, c'est Dieu, par amour, qui abdique sa puissance et sa liberté. Ce qui est impossible pour nous, parce que malgré toute notre volonté et notre amour, il est toujours possible et même parfois nécessaire de se désengager est possible pour Dieu, dans ce sacrement d'amour.
Le baptême, c'est un pacte. Une alliance. Eternelle.
Cette filiation ne supplante pas les autres, évidemment, ce serait absurde, puisque finalement elle est de la même lignée. Mais elle rappelle, à tous, car le baptême est un témoignage, d'où nous sommes, quelle est notre origine, quelle est notre plus profonde filiation. En Dieu.
C'est ce que dit Jésus, dans cette première pause après cette course haletante depuis son baptême. Je suis de la famille de Dieu, comme tous ceux là, qui sont ma mère, mes frères. Evidemment que ses parents restent ses parents. Mais cette famille, par le baptême s'est élargie. Mais ce n'est pas fini, cette nouvelle famille, que je découvre à l'occasion de mon baptême, ou quand on m'expliquera la signification profonde de ce baptême, elle m'est en quelque sorte imposée, de la même façon que ma famille classique l'était elle aussi. Et qu'est ce que je dois faire avec elle, avec ce peuple ? Et bien , je dois, tout simplement me rappeler qu'ils sont, tous, de la même origine que moi. Je dois aussi leur rappeler, leur apprendre s'ils le méconnaissent qu'ils sont issus de cette même origine. Je le ferai avec mes limites. Mais justement, je ne suis pas seul, je ne suis pas enfermé. J'ai des frères et des sœurs sur qui je vais devoir compter. Je vais apprendre à aimer ces frères et ses sœurs mais je vais l'apprendre en toute liberté. Ce ne sera plus une obligation familiale. Ce sera juste remettre ma vie en cohérence avec ce que je viens de découvrir en le vivant. Le sacrement de cette nouvelle filiation, qui est à la source de toutes les autres.
Ainsi Alice, Alice aux yeux bleus, Alice qui a fait ses quelques premiers pas inventifs dans mon bureau à la grande joie très exprimée de son père, premier pas non tenus, premiers pas libres, nous dit quelque chose qui parle des premier pas du baptisé, même adulte, même vieillard. Premiers pas non tenus guidés par une promesse qui elle sera toujours tenue.
Ainsi Alice et ses parents, Ainsi Alice et sa grande sœur Léa, Ainsi Alice avec tous ces nouveaux frères et sœurs inconnus dans la maison desquels elle se sent chez elle, pourquoi ? Parce qu'elle est chez elle, bien qu'elle soit petite, bien qu'elle soit nouvelle. Regardons nous, qu'y avait t il de si différent dans nos vies il y a 16 mois ? Alice nous apprend que nous aurions intérêt à entendre toute la nouveauté de Dieu dans nos vies, nous laisser inspirer par une parole de Dieu surprenante, qui balaiera la monotonie des jours.
Alice a été baptisée , aujourd'hui, le 15 janvier 2012, nous sommes ses frères et sœurs, en Dieu, par Jésus-Christ.
Isabelle et Philippe ont permis aujourd'hui que lui soit donnée ce cadeau, l'engagement de Dieu dans sa vie. A elle, un jour, avec l'aide de ses parents, de sa grande sœur et marraine, de Timothy, et de tous ces engagés que nous sommes aujourd'hui, d'en trouver et d'en retrouver les échos favorables.
AMEN.
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