Qui nous fera voir le bonheur ? (prédication du week end des 21 et 22 avril, Maison Fraternelle et Port Royal)
LECTURES
Psaume 4
2Quand
je crie, réponds-moi, Dieu de ma justice !Dans la détresse, tu
me mets au large.Fais-moi grâce, entends ma prière !3Hommes,
jusqu’à quand ma gloire sera-t-elle changée en confusion ?Jusqu’à
quand aimerez-vous ce qui est creux,rechercherez-vous le
mensonge ?Pause.4Sachez
que le SEIGNEUR distingue celui qui lui est fidèle ;quand
je l’invoque, le SEIGNEUR entend.5Agitez-vous,
mais ne péchez pas ;parlez en votre cœur, sur votre lit,puis
taisez-vous.Pause.
(silence)
6Offrez
des sacrifices de
justice et
mettez votre confiance dans le SEIGNEUR.7Beaucoup
disent : Qui
nous fera voir le bonheur ?Fais
lever sur nous la lumière de ta face, SEIGNEUR !8Tu
mets dans mon cœur plus de joie qu’au temps où abondent leur
froment et leur vin.9Aussitôt
couché, je m’endors en paix,car toi seul, SEIGNEUR, tu me fais
habiter en sécurité.
Jean 12.
1Six jours avant la Pâque, Jésus vint à Béthanie, où était Lazare qu’il avait réveillé d’entre les morts. 2Là, on donna un dîner pour lui ; Marthe servait, et Lazare était l’un de ceux qui étaient à table avec lui.3Marie, donc, prit une livre d’un parfum de nard pur de grand prix, en répandit sur les pieds de Jésus et lui essuya les pieds avec ses cheveux ; la maison fut remplie de l’odeur du parfum. 4Un de ses disciples, Judas Iscariote, celui qui allait le livrer, dit alors : 5Pourquoi n’a-t-on pas vendu ce parfum trois cents deniers pour les donner aux pauvres ?
PRÉDICATION
Qui
nous fera voir le bonheur ?
Telle
est la question relayée par l'auteur du Psaume 4 , que selon
lui, beaucoup, se posent.
En
ces temps d'élection, et malgré ce pessimisme collectif bien
français, au fond de nous, toute petite, toute renfrognée, cette
question est encore là, au fond de nous, au moment où nous allons,
peut être déposer un bulletin dans l'urne.
Alors
d'abord je voudrais aborder un point, à propos de l'élection,
justement. Ce grand mot, aux consonances religieuses, si forte, au
moment où les sondages nous poussent à contempler l'apparition
progressive de l'Elu.
L'élection
présidentielle, et les autres, est d'abord une sélection.
Au
terme d'un parcours impitoyable, celui qui aura été élu sera le
résultat d'une sélection basée sur des critères divers, que je
vous laisse le soin d'apprécier demain et dans 15 jours.
L'élection
spirituelle est d'un tout autre ordre. Prenez le Christ, considéré
comme l'Elu pour les chrétiens. Croyez vous qu'il a été
sélectionné, a t il mené campagne ? Croyez vous, et là je
nous mets dans une ambiance de naïveté spirituelle, qu'il est bon
de réactiver parfois, que son Père ait convoqué tous ses fils
potentiels et leur aurait dit, toi, non, toi, non plus, et puis
finalement je te prends toi, parce que tu le sembles le plus
compétent. Ou. Que tu racontes la meilleure histoire. Il a été le
Christ, parce que c'était lui, et parce que c'était lui, il n'y
avait de concurrence. Même l’élection de David, que la Bible
raconte en faisant défiler ses frères, n'est même pas une
sélection. C'était lui, le plus jeune, qui ne demandait rien, sur
lequel le récit se focalisera.
Croyez
vous aussi que l'amour de Dieu pour vous est le résultat d'une
sélection ?
Penses
tu toi, que l'amour de Dieu pour toi est le résultat d'un sélection,
que tu as gagnée pour être élu comme destinataire de l'amour
incommensurable de Dieu ?
Non,
tu as été élu parce que c'était toi, et dans ce mouvement de Dieu
pour toi, tu n'avais aucun concurrent . Tu n'as pas été
sélectionné, tu es simplement aimé. Par Dieu qui t'a choisi toi
parce que c'était Toi. Il n'y a pas eu de carrière, de primaire, de
premier , deuxième ou troisième tour. Il n'y a eu qu'un seul
mouvement de Dieu vers toi.
Continuons
avec cette question du Psaume : Qui
nous fera voir le bonheur ?
Et
regardons le texte de Jean, un des nombreux textes où une femme avec
du parfum embaume l'ambiance des récits de l'évangile. Parfois
cette femme a un nom, parfois elle est anonyme.
La
thèse de cette prédication est que c'est elle, dans l'évangile qui
nous fait voir le bonheur.
la
maison fut remplie de l’odeur du parfum
Elle
nous fait voir, car elle désigne, celui ci, à table, chez ses amis
de Béthanie, et c'est lui, le bon heur, c'est à dire l'occasion
favorable de reprendre sa vie en mains, pour lui donner des objectifs
plus intéressants, plus profonds, moins frappés de vanité. Elle le
désigne, le consacre, fait de lui le Christ, c'est à dire celui qui
est « oint », qui reçoit l'onction.
Le
geste qu'elle accomplit est prodigue, elle dépense 300 deniers pour
désigner le Christ. Il y dans ce geste, la profusion, la gratuité,
et la prodigalité de Dieu. C'est la grâce de Dieu qu'elle exprime
ce jour là, à ce moment là. Ce n'est pas le résultat d'une
sélection, mais juste la grâce. Absolue. La même qui vient te
chercher dans ton recoin abandonné.
Alors
évidemment, il y a Judas. Le Judas. Qui se plaint, qui trouve
inamissible de dépenser tout ce argent alors qu'en termes
politiquement correct, cet argent, on aurait pu le donner aux
pauvres.
Mais
c'est là que le texte, tel qu'il est construit, et malgré cette
remarque, rend la victoire de la grâce complète.
Cette
mention de la remarque de Judas n'aurait jamais été entendu si
Marie était venue avec son parfum et qu'elle se soit dit finalement,
que ce qu'elle s'apprêtait de faire était un peu idiot. Que
finalement, elle allait plutôt vendre son parfum, et en donner la
réalisation à l'entraide de la communauté des disciples.
C'est
parce qu'elle a utilisé ce parfum que nous avons pu entendre cette
remarque. C'est à dire que la grâce de Dieu qui nous permet de voir
le bonheur permet aussi à ceux qui ne voit pas cette grâce d'être
entendus. C'est à dire que cette grâce de Dieu embarque toute
l'humanité avec elle, y compris ceux qui lui sont hostiles, qui ne
la comprennent pas, qui ne veulent rien voir, entendre, sentir. Même
Judas. Cette grâce de Dieu est révélatrice de tous, et le geste de
Marie, qui désigne Jésus comme Christ, ou mieux, qui fait de Jésus
le Christ, révèle Judas, que le récit ensuite désignera comme un
voleur (sans doute pour que nous ne pactisions pas avec lui, et nous
dire, comme nous le faisons trop souvent en Eglise, oui ça, cette
dépense là, nous ferions mieux de ne pas la faire, cet argent
serait mieux utilisé ailleurs, et qui nous rend si souvent si
pusillanimes avec la grâce de Dieu, pusillanimes, mais rationnels).
Dans
ce monde que nous pouvons trouver tellement disgracieux, tellement
pusillanime, tellement peu prodigue, généreux. Dans notre monde où
nous avons du mal à savoir qui nous désignera le bonheur, dans
notre monde de sélection et de compétition. Dans notre parcours
dans notre monde, ré-entendons la question relayée par le
psalmiste. « qui nous fera voir le bonheur »
Et
trouvons la réponse avec Marie qui dépense sans compter pour nous
montrer celui, l'Elu de Dieu, qui nous ouvre un nouveau chemin, et
qui répand, dans toute la maison, un parfum entêtant, qui ne va pas
nous lâcher. Et tous les Judas n'y pourront jamais rien. Jamais.
Commentaires
Enregistrer un commentaire