PREDICATION DU 6 MAI 2012


1 Corinthiens 3.1-23
1Quant à moi, mes frères, ce n’est pas comme à des êtres spirituels que j’ai pu vous parler, mais comme à des êtres charnels, comme à des tout-petits dans le Christ. 2Je vous ai donné du lait ; non pas de la nourriture solide, car vous n’auriez pas pu la supporter ; d’ailleurs, maintenant même vous ne le pourriez pas, 3parce que vous êtes encore charnels. En effet, pour autant qu’il y a parmi vous des passions jalouses et des disputes, n’êtes-vous pas charnels ? Ne vous comportez-vous pas d’une manière tout humaine ? 4Quand l’un dit : « Moi, j’appartiens à Paul ! » et un autre : « Moi, à Apollos ! », êtes-vous autre chose que des humains ?
5Qu’est-ce donc qu’Apollos ? Qu’est-ce que Paul ? Des serviteurs, par l’entremise desquels vous êtes venus à la foi, selon ce que le Seigneur a accordé à chacun. 6Moi, j’ai planté, Apollos a arrosé, mais c’est Dieu qui faisait croître. 7Ainsi, ce n’est pas celui qui plante qui importe, ni celui qui arrose, mais Dieu, qui fait croître. 8Celui qui plante et celui qui arrose ne sont qu’un, mais chacun recevra son propre salaire selon son propre travail. 9Car nous sommes des collaborateurs de Dieu. Vous êtes le champ de Dieu, la construction de Dieu.


PREDICATION
Paul a un problème. Non pas avec Apollos, dont on va parler, mais avec cette Eglise de Corinthe. Une Eglise clivée en deux camps. L'un qui se revendique de Paul, l'autre d'Apollos.
Qui est Apollos ?
Le mieux c'est d'abord de simplement lire cette extrait du livre des Actes, écrit par Luc, qui parle le plus de cet illustre inconnu :


ACTES 18
18.18 Paul resta encore assez longtemps à Corinthe. Ensuite il prit congé des frères, et s'embarqua pour la Syrie, avec Priscille et Aquilas, après s'être fait raser la tête à Cenchrées, car il avait fait un voeu.
18.19 Ils arrivèrent à Éphèse, et Paul y laissa ses compagnons. Étant entré dans la synagogue, il s'entretint avec les Juifs,
18.20 qui le prièrent de prolonger son séjour.
18.21 Mais il n'y consentit point, et il prit congé d'eux, en disant: Il faut absolument que je célèbre la fête prochaine à Jérusalem. Je reviendrai vers vous, si Dieu le veut. Et il partit d'Éphèse.
18.22 Étant débarqué à Césarée, il monta à Jérusalem, et, après avoir salué l'Église, il descendit à Antioche.
18.23 Lorsqu'il eut passé quelque temps à Antioche, Paul se mit en route, et parcourut successivement la Galatie et la Phrygie, fortifiant tous les disciples.
18.24 Un Juif nommé Apollos, originaire d'Alexandrie, homme éloquent et versé dans les Écritures, vint à Éphèse.
18.25 Il était instruit dans la voie du Seigneur, et, fervent d'esprit, il annonçait et enseignait avec exactitude ce qui concerne Jésus, bien qu'il ne connût que le baptême de Jean.
18.26 Il se mit à parler librement dans la synagogue. Aquilas et Priscille, l'ayant entendu, le prirent avec eux, et lui exposèrent plus exactement la voie de Dieu.
18.27 Comme il voulait passer en Achaïe, les frères l'y encouragèrent, et écrivirent aux disciples de le bien recevoir. Quand il fut arrivé, il se rendit, par la grâce de Dieu, très utile à ceux qui avaient cru;
18.28 Car il réfutait vivement les Juifs en public, démontrant par les Écritures que Jésus est le Christ


Paul, lui parle d'Apollos dans les chapitres 1, 3 et 4 de la 1ere lettre aux Corinthiens

Apollos est donc originaire d'Alexandrie, il nous est présenté à Ephèse comme un homme éloquent, versé dans les écritures, informé de la Voie du Seigneur, plein de ferveur et enseignant avec exactitude tout ce qui concerne Jésus. On nous indique un point faible : il ne connait que le baptême de Jean. Ce couple, ami de Paul, Priscille et Aquila, va l'instruire à propos du baptême de Jésus. Ce détail révèle la pérennité du courant de Jean le Baptiseur jusqu'en  60.


Apollos semble-t-il est un puissant, un excellent orateur et c'est par son éloquence qu'il attire des gens à lui. Il réfute, il persuade.
Venons en maintenant à Paul, qui comme vous le savez a un nom hébraïque : Saul, qui signifié « désiré » qui signifie « demandé »,
Mais comme vous le savez aussi Saul, Saul, a préféré choisir un autre nom, latin, Paulus, qui signifie « petit ».
Ce « petit » d'ailleurs se traite lui-même d'avorton.
L'opposé de quelqu'un , qu'on demande, qu'on admire, qu'on désire.
Paul, c'est celui qui a bien établi la logique qui fonde son ministère. Dans la seconde lettre aux Corinthiens, nous lisons au chapitre 4 verset 13 :


« J'ai cru, c'est pourquoi j'ai parlé » (2 Cor. 4 : 13) 
J'ai cru d'abord. J'ai fait confiance. Et ensuite, j'ai parlé.




Voici ce que dit Bossuet, de Paul, dans sonPanégyrique de l’Apôtre Saint Paul, qu'il rédige alors qu’il est âgé de trente ans :
« N’attendez pas, Chrétiens, de ce céleste prédicateur ni la pompe ni les ornements dont se pare l’éloquence humaine. […] N’attendez donc pas de l’Apôtre, ni qu’il vienne flatter les oreilles par des cadences harmonieuses, ni qu’il veuille charmer les esprits par de vaines curiosités. Écoutez ce qu’il dit lui-même : Nous prêchons une sagesse cachée ; nous prêchons un Dieu crucifié (I Co 1, 23)  » .
 « Il [saint Paul] ira, ignorant de l’art de bien dire, avec cette locution dure, avec cette phrase qui sent l’étranger, il ira en cette Grèce polie, la mère des philosophes et des orateurs ; et malgré la résistance du monde, il y établira plus d’Église que Platon n’y a gagné de disciples par cette éloquence qu’on a crue divine » .
Pour Bossuet , la parole de Paul possède « une certaine vertu plus qu’humaine qui persuade contre les règles, ou plutôt qui ne persuade pas tant, qu’elle captive les entendements ; qui ne flatte pas les oreilles, mais qui porte ses coups droit au cœur ».

Et on pourrait aussi citer
(« La vraie éloquence se moque de l'éloquence », Pascal, Pensées)
Oui, Apollos fait partie des gens qui persuadent . Paul, fait partie des gens qui convainquent. C'est très différent. Celui qui veut persuader s'adresse au sentiments, aux émotions, dont la peur, celui qui convainc s'adresse comme l'a dit Bossuet aux «entendements », c'est à dire à l'intelligence, l'intelligence profonde, cachée, celle qui vit en nous, parfois, insoupçonnable.


Ainsi chez les Corinthiens était passé quelqu'un qui savait parler, et un autre qui s'il savait dicter des splendides lettres (dont on a souvent de la peine à considérer le plan), quelqu'un, dont on ne connait pas la voix, mais dont on se doute qu'il passait par dessus les règles de l'éloquence, de la rhétorique classique, qui méprisait les sophistes et tous ceux qui avec leur parole séductrice (séduire, c'est faire venir à soi, alors que Paul ne veut que faire venir à Christ),tous ceux là, tous ces séducteurs qui sont capables d'émouvoir, mais ne produisent rien d'autre, finalement, que l'attachement à leur propre parole. Et au plaisir qu'elle a pu procurer. Tous ceux qui ne favorisent que l'addiction à eux-mêmes : les enchanteurs.
Paul ne méprise pas Apollos, mais se rend compte que les Corinthiens aiment retrouver en lui les effets de ces bateleurs qu'étaient devenus les sophistes, ces fameux sages critiqués par Paul.
Paul, ce petit, cet avorton, ne cherche pas à plaire. Il ne cherche pas qu'on l'aime, mais il veut tout simplement révéler le Christ.
Il ne cherche pas à persuader. Ni à vaincre, car pour lui la véritable victoire a été acquise en Christ. Mais il veut, comme je l'ai dit, à tout simplement, convaincre. En s'adressant à l'intelligence profonde, celle qui vit au fond de nous, cette intelligence, beaucoup plus intelligente que nous mêmes.
Dans le passage que nous avons entendu, Paul tente de ressouder cette Eglise clivée. Pour ce faire, il ne s'adresse pas même pas à ses partisans, qui eux mêmes n'ont rien compris s'ils disent « moi j'appartiens à Paul ».
Paul, d'une façon stupéfiante se relativise lui même, et parle de lui, ou d’Apollos, comme de choses « qu'est ce que Paul, qu'est ce qu'Apollos ? » . Ce sont des serviteurs, l'un a planté, l'autre a arrosé.Mais Dieu seul fait croitre.
Ainsi, pour conclure ce message et pour le relier, de façon non subliminale, à l'actualité française du jour : disons le franchement , après cette campagne où disons le , la Parole a tant souffert, s'est tellement dévaluée, où des flots d'éloquences ont presque fini par nous spolier, ce passage de la lettre aux Corinthiens devient une offre de jouvence, une source bienfaisante. Elle déplace le problème, elle nous sort de la pure logique partisane. Ce passage nous délivre un remède qui vient nous décontaminer de toute cette communication. « Qu'est ce que Paul, qu'est ce qu'Apollos ? ». C'est Dieu qui fait croitre.
A nous, qui avons été écrasés par tant de paroles, et qui pourrions être entrainés à douter de la parole même de Dieu, rappelons que celle ci s'offre au prophète Elie , dans un murmure, ou pour employer une meilleure traduction, par la voix d'un fin silence. Silence par lequel, je voudrai conclure cette prédication, avant que la musique vienne prolonger notre méditation intérieure
(silence, musique)

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