Prédication 13 janvier 2013." C'est déjà ça !"

C'EST DÉJÀ ÇA !
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Psaume 104
1Que je bénisse le SEIGNEUR !SEIGNEUR, mon Dieu, tu es très grand,tu es revêtu d’éclat et de magnificence !

2Il s’enveloppe de lumière comme d’un manteau ;il déploie le ciel comme une toile.3Il fixe sur les eaux ses chambres à l’étage,il prend les nuages pour char,il s’avance sur les ailes du vent.4... le feu flamboyant est à son service ;5il fonde la terre sur ses bases,jamais, jamais elle ne vacillera.


6Tu l’avais couverte de l’abîme comme d’un vêtement,les eaux se tenaient sur les montagnes ;7elles fuient quand tu les rabroues,elles se précipitent au bruit de ton tonnerre :8elles montent dans les montagnes, descendent dans les vallées,vers le lieu que tu leur as assigné.9Tu as posé une limite qu’elles ne doivent pas passer,afin qu’elles ne reviennent pas couvrir la terre.


10Il conduit les sources dans des torrents qui coulent entre les montagnes.11Elles font boire tous les animaux des champs ;les ânes sauvages y étanchent leur soif.12Les oiseaux du ciel demeurent près d’elles et font entendre leur voix parmi le feuillage.13De ses chambres à l’étage il arrose les montagnes ;

la terre est rassasiée du fruit de tes œuvres.

14Il fait pousser l’herbe pour les bêtes,et les plantes que l’homme cultive,pour tirer le pain de la terre,15le vin qui réjouit le cœur de l’homme,faisant plus que l’huile resplendir son visage, et le pain qui soutient le cœur de l’homme.16Les arbres du SEIGNEUR sont rassasiés,les cèdres du Liban, qu’il a plantés.17C’est là que les oiseaux font leurs nids ;la cigogne a sa demeure dans les cyprès,18les montagnes élevées sont pour les bouquetins,les rocs sont l’abri des damans,19Il a fait la lune pour marquer les rencontres festives ;le soleil sait quand il doit se coucher.20Tu amènes les ténèbres, et c’est la nuit où tous les animaux de la forêt se mettent à fourmiller ;21les jeunes lions rugissent après leur proie :ils demandent à Dieu leur nourriture.22Le soleil se lève : Ils se retirent et se couchent dans leurs tanières.23L’homme sort pour se rendre à son ouvrage et à son travail, jusqu’au soir.

24Que tes œuvres sont nombreuses, SEIGNEUR !Tu les as toutes faites avec sagesse ;la terre est remplie de tout ce que tu as produit.25Voici la grande et vaste mer :là fourmillent sans nombredes animaux petits et grands ;26là se déplacent les bateauxet Léviathan, que tu as façonné pour jouer avec lui.27Eux tous mettent leur espoir en toi, pour que tu leur donnes leur nourriture en son temps.28Tu la leur donnes, et ils la recueillent ;tu ouvres ta main, et ils sont rassasiés de biens ;29tu te détournes : ils sont saisis d’épouvante ;tu leur retires le souffle : ils périssent et retournent à leur poussière.30Tu envoies ton souffle : ils sont créés,et tu renouvelles la terre.

31Que la gloire du SEIGNEURsubsiste toujours !Que le SEIGNEUR se réjouisse de ses œuvres !32Il regarde la terre, et elle frissonne ;il touche les montagnes, et elles fument.

33Je chanterai pour le SEIGNEUR tant que je vivrai,je chanterai pour mon Dieu tant que j’existerai.34Que ma requête lui soit douce !
Moi, je veux me réjouir dans le SEIGNEUR.
35Que les pécheurs disparaissent de la terre,et que les méchants ne soient plus !

Que je bénisse le SEIGNEUR !Louez le SEIGNEUR !




ÉCOUTONS MAINTENANT CE PASSAGE DE L'EVANGILE SELON LUC au chapitre 3, du verset 21  au verset 22.

21Quand tout le peuple reçut le baptême, Jésus aussi reçut le baptême ; et, pendant qu’il priait, le ciel s’ouvrit, 22et l’Esprit saint descendit sur lui sous une forme corporelle, comme une colombe. Et il survint une voix du ciel : Tu es mon Fils bien-aimé ; c’est en toi que j’ai pris plaisir.

PRÉDICATION


Vous avez entendu le Psaume 104. Je ne sais pas comment vous l'avez entendu. Si vous vous êtes laissés bercer par cette belle louange, qui commence et qui finit par "que je bénisse le Seigneur" , cette très considérable louange qui rappele que tout, c'est l'acte de Dieu, l'acte permanent et créatif de Dieu.
Que tes œuvres sont nombreuses, SEIGNEUR !Tu les as toutes faites avec sagesse 
Mais peut-être avez vous remarqué quelques éléments de sa composition. Tantôt l'écrivain emploie la 3e personne du singulier.
il déploie le ciel comme une toile
Tantôt la deuxième , on sent qu'il y a un frottement quand même, pourquoi ne pas en rester à 3e personne ? Comme le font tant d'autre textes de Louange. S'agit il de préparer le terrain ?
la terre est remplie de tout ce que tu as produit.
Et la première personne est aussi employée.
Je chanterai pour le SEIGNEUR tant que je vivrai
Mais peut-être avez vous été interpelé par sa finale, qui commence par une demande de permission, presque timide :
Que ma requête lui soit douce !

et juste après une formule instante, ce n'est plus je, mais moi je. On dirait que ça préparer le coup d'éclat final.

Moi, je veux me réjouir dans le SEIGNEUR
car quelque chose semble finalement empêcher le compositeur de ce psaume de se réjouir totalement, avec ce Dieu total. Il fait donc une requête, qui semble rompre le charme du Psaume. La voici, cette requête.
35Que les pécheurs disparaissent de la terre,et que les méchants ne soient plus !

Ce Psaume illustre en fait une grand révolution de l'esprit humain. Un passage que j’appellerai du tout au "je". En termes philosophique, on parlerait de la venue au monde du "sujet".
Oui d'abord, tout est dans les mains de Dieu. Les étoiles, la nuit, le jour, les lions, c'est Dieu. Le vin, le pain, l'humain, le plaisir. C'est Dieu Le bien, c'est Dieu. Mais le mal, c'est Dieu.
Réécoutez ce que dit le psalmiste juste avant sa requête. On sent déjà que le sujet, va pleinement s'exprimer, et pas juste pour dire "je chanterai toujours" On sent qu'il va bientôt prétendre regarder le tout en face et protester. Ecoutez comment c'est bien amené :
Eux tous mettent leur espoir en toi, pour que tu leur donnes leur nourriture en son temps.28Tu la leur donnes, et ils la recueillent ;tu ouvres ta main, et ils sont rassasiés de biens ;29tu te détournes : ils sont saisis d’épouvante ;tu leur retires le souffle : ils périssent et retournent à leur poussière.30Tu envoies ton souffle : ils sont créés,et tu renouvelles la terre.
Tu te détournes, tu leur retires le souffle.
Oui, apparamment ce Psaume est un psaume de Louange, mais quand on y regarde de plus près, il est le marqueur de la fin d'une époque de la religion. Oui, la création est immense, infinie, elle est acte permanent et l'homme est pris dedans, compris, comme un destin qui roule et dans lequel il n'a rien à dire sauf à suivre la nature par une religion naturelle.
Sauf que cette religion là n'est plus possible. Car quelqu'un vient de naître, c'est celui qui tout à coup dit Je , et dit à ce grand Tout Puissant : "tu" "tu te détournes" "tu leur retires le souffle".
et demande. 
Demande quelque chose à ce quelqu'un dont il avait auparavant décrit la magnificence, la souveraineté absolue, le pouvoir grandiloquent.
"fais disparaitre les méchants, aussi".
car, Moi, je veux me réjouir.
...Que ma requête soit douce.
mais
Moi je veux me réjouir.


bref passage musical.


Voilà donc pour le Psaume, qui illustre le passage d'un humain découvrant son existence singulière, ou inventant son existence singulière, qui se met face à Dieu, le pose comme un interlocuteur, et lui dit Moi je.
Quel lien avec le texte de l'évangile ?
Limpide, je le crois. Et ce lien nous permettra de comprendre le sens profond du baptême de Jésus, et donc de notre propre baptême.
La formule de Luc est remarquable, anodine en apparence.
Quand tout le peuple reçut le baptême, Jésus aussi reçut le baptême 
Première lecture: Jésus fait comme tout le monde. Il se fait baptiser. Mais voilà, dans cette phrase, d'un côté il y a "tout le peuple" et de l'autre côté il y a "Jésus aussi reçut le baptême". Luc aurait pu dire: Tout peuple et Jésus aussi reçurent le baptême. Mais non.
Il y a tout le peuple, et il y a Jésus.
Dans l'esprit de ce Psaume : il y a tout, et il y a "un sujet".
En cette époque où la notion même de "personne" telle que nous l'entendons aujourd'hui n'existait pas, où imaginer une singularité individuelle était impossible, nous lisons dans l'évangile, qu'il y a le peuple, et qu'il y a Jésus. Certes, on peut me retorquer que c'est dit ainsi parce que c'était Jésus, justement. Mais je réponds oui, bien sûr, mais considerez l'effet que cela produit. Tout à coup, un homme nait, il est distingué de la foule. Au délà de Jésus, c'est le sujet qui apparait, et c'est toute la force du christianisme qui nait, là sous vos yeux. Tout à coup, un sujet sort de la foule. Comme vous, comme chacun de vous, qui sentez bien, que vous n'êtes pas comme chacun qui vous entoure.
Mais cela ne suffirait pas s'il n'y avait pas ce dialogue du baptême qui va consacrer la naissance de ce sujet.
Esprit saint descendit sur lui sous une forme corporelle, comme une colombe. Et il survint une voix du ciel : Tu es mon Fils bien-aimé ; c’est en toi que j’ai pris plaisir.


Ainsi, dans ce Psaume, nous avons vu la sortie d'une certaine forme de religion vers la naissance d'un sujet, un sujet qui proteste, devant le mal qu'il n'arrive plus à considérer comme quelque chose de normal.
Mais nous aurions pu rester en suspension, avec cette requête, comme celle du notre père, "délivre nous du mal".
Continuer longtemps, à exister certes, mais tout seul devant l'immensité, et cette nature qui roule, qui meurt et qui vit.
Oui, dans ce Psaume, il y a la naissance d'un sujet qui sort de l'emprise du tout, et demande quelque chose à celui qu'il a toujours considéré comme l’Acteur de toute la création.
Et la réponse évangélique est déroutante.
Voici Jésus, qui vient incarner ce sujet là qui est né dans le temps de l'écriture de ce Psaume. Tout le peuple se fait baptiser, mais lui a un nom.
Et c'est Dieu qui vient lui dire Tu : tu es mon fils bien aimé.
C'est cette parole là qui manquait dans ce Psaume. Le sujet avait beau avoir réussi à sortir de la masse, pour regarder Dieu en face, mais celui ci était resté enveloppé dans sa grandeur et son immensité, et dans une forme de silence.
Mais là, il répond. " Tu es mon Fils". Je reconnais ton existence singulière. Je te reconnais. Je t'ai vu. Je t'aime tel que tu es. Je te répond puisque tu m'as parlé. Désormais le dialogue, dans les deux sens s'est établi. Et...

C'est déjà ça...

Certes, il y a déjà eu des dialogues entre Dieu et l'homme dans la Bible.
Mais dans ce récit du baptême est la consécration de ce dialogue.
Ainsi donc, je vous invite à repenser à votre baptême chaque jour à nouveaux frais. Avant d'être le baptême de toute le monde, c'est le vôtre, en tant que sujet singulier.
Vous n'êtes pas meilleur ou pire, mais simplement votre existence singulière est affirmée lors de votre baptême.
Vous pouvez vous adresser à Dieu (les croyants devraient un jour réaliser que cette possibilité est inouïe) . C'est cette possibilité que saisit l'auteur de ce Psaume très pertinent.
Mais il n'y a pas qu'un sens dans ce dialogue.
Celui auquel vous vous adressez s'adresse à vous, de la même façon qu'il s'adresse à Jésus : vous êtes son fils, ou sa fille bien aimée.
Distingué, vous n'êtes plus englué dans le cycle des réveils et des sommeils du lion.
Vous n'avez pas résolu le problème des pécheurs et des méchants. Vous n'avez pas résolu le problème du mal. Mais il vous dit " tu es mon fils, ou ma fille bien aimée". Et,...

C'est déjà ça...
C'est déroutant comme réponse. Peut-être nous invite elle à penser que le déroulement de la création est aussi entre nos mains singulières ?

Le baptême devient un sacrement quand nous réalisons grâce à ce baptême que notre existence même devient consacrée.
AMEN.

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