Caroubes (10 mars 2013<---)
Luc 15: 11-32
11Il dit encore : Un homme avait deux fils. 12Le plus jeune dit à son père : « Père, donne-moi la part de fortune qui doit me revenir. » Le père partagea son bien entre eux. 13Peu de jours après, le plus jeune fils convertit en argent tout ce qu’il avait et partit pour un pays lointain où il dilapida sa fortune en vivant dans la débauche. 14Lorsqu’il eut tout dépensé, une grande famine survint dans ce pays, et il commença à manquer de tout. 15Il se mit au service d’un des citoyens de ce pays, qui l’envoya dans ses champs pour y faire paître les cochons. 16Il a urait bien désiré se rassasier des caroubes que mangeaient les cochons, mais personne ne lui en donnait. 17Rentré en lui-même, il se dit : « Combien d’employés, chez mon père, ont du pain de reste, alors que moi, ici, je meurs de faim ? 18Je vais partir, j’irai chez mon père et je lui dirai : “Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi ; 19je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ; traite-moi comme l’un de tes employés.” » 20Il partit pour rentrer chez son père.
Comme il était encore loin, son père le vit et fut ému ; il courut se jeter à son cou et l’embrassa. 21Le fils lui dit : « Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. » 22Mais le père dit à ses esclaves : « Apportez vite la plus belle robe et mettez-la-lui ; mettez-lui une bague au doigt et des sandales aux pieds. 23Amenez le veau engraissé et abattez-le. Mangeons, faisons la fête, 24car mon fils que voici était mort, et il a repris vie ; il était perdu, et il a été retrouvé ! » Et ils commencèrent à faire la fête.25Or le fils aîné était aux champs. Lorsqu’il revint et s’approcha de la maison, il entendit de la musique et des danses. 26Il appela un des serviteurs pour lui demander ce qui se passait. 27Ce dernier lui dit : « Ton frère est de retour, et parce qu’il lui a été rendu en bonne santé, ton père a abattu le veau engraissé. » 28Mais il se mit en colère ; il ne voulait pas entrer. Son père sortit le supplier. 29Alors il répondit à son père : « Il y a tant d’années que je travaille pour toi comme un esclave, jamais je n’ai désobéi à tes commandements, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour que je fasse la fête avec mes amis ! 30Mais quand ton fils que voici est arrivé, lui qui a dévoré ton bien avec des prostituées, pour lui tu as abattu le veau engraissé ! » 31Le père lui dit : « Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi ; 32mais il fallait bien faire la fête et se réjouir, car ton frère que voici était mort, et il a repris vie ; il était perdu, et il a été retrouvé ! »
CHANT 162: 1, 2,4 : O viens Seigneur, ne tarde pas
Je me demandais avec quel nouvel angle j'allais aborder cette parabole, une des plus connues de l'évangile, et avouons-le, assez récurrente dans nos textes du jour.
Quand tout à coup m'est apparue une question, que je ne m'étais jamais posée.C’est à propos du jeune fils là, vous savez, quand il est avec les cochons, et qu'il se plaint qu'il se serait bien nourri de leurs caroubes, mais qu'hélas, personne ne lui en donne.
Ça m'a paru évident : mais pourquoi ne prend-il pas lui-même les caroubes, seul qu'il est dans son champ, ce n'est quand même pas sorcier ? Ce sont des gousses d'environ 30 centimètres de long, c'est très bon= vous voulez un petit exposé sur les caroubes ?
La caroube est le fruit issu du caroubier. Ce fruit renferme des graines qui sont utilisées généralement comme substituant du cacao. Cette plante a été cultivée depuis l’antiquité dans la région méditerranéenne plus précisément en Afrique du Nord, au Proche-Orient, dans les îles Canaries, en Espagne et en Sicile. La caroube est agrémentée par sa saveur chocolatée. En Chypre, on utilise les graines du caroubier pour fabriquer des confiseries. Vous avez sûrement déjà consommé de la caroube car on l’utilise généralement dans la pâtisserie. La caroube, sous forme de poudre appelée encore farine de caroube est connues pour ses vertus médicinales .
C'était pour nous détendre un peu. Revenons-en à lui : quel empoté quand même de ne pas profiter de son époque où l'on nourrissait normalement les animaux, pour qu'ils soient bons, et de saisir, ce qui aurait pu lui aussi, le nourrir.
Mais non. En fait, quand on prolonge un peu cette idée, le plus jeune fils est quelqu'un qui ne semble savoir agir que par le don qu'il reçoit. Et s'il ne reçoit rien, et bien, il va mal.
Quand il a décidé de partir, il dit bien à son père : Donne moi ce qui me revient. Et il part. Ensuite, il dépense tout , c’est un délire de riche. Il vit comme si tout lui était donné. C'est le plaisir de la dépense sans souffrance. En effet, quand on a vraiment beaucoup d'argent, c'est comme si tout nous était donné.
Ensuite, avec les cochons, là, on ne lui donne rien, et là donc, il va mal.
Ensuite, son père lui ouvre les bras avant même qu'il ait pu lui dire entièrement le petit chapelet qu'il lui avait préparé. C'est comme la liturgie du culte, vous recevez la grâce de DIEU avant même de vous repentir. C’est n’est pas échange, c’est un don.
Et le veau gras, la fête, du don, rien que du don.
Voici donc ma première réflexion. Ce type là est obligé pour sa vie d’attendre qu’on lui donne.
La question charnière que je me suis donc immédiatement posée était de vérifier que dans ce qu'on raconte sur le fils aîné, celui qui reste, le bougon, qui est censé être, d'après l'interprétation courante de cette parabole, l'opposé de son jeune frère, s’il existait des marques de cette opposition.
Et non. Au contraire : je fus frappé par cette phrase qui fait partie de sa protestation :
Jamais je n’ai désobéi à tes commandements, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour que je fasse la fête avec mes amis !
Encore la notion de donner, qui arrive pour la troisième fois.
Alors je me suis dis, en entendant cette phrase, qu'en fait c'est la même problématique que celle des caroubes. Si le fils le plus jeune aurait pu très bien prendre les caroubles qui lui étaient offertes , le fils aîné lui aussi, aurait pu se servir, comme en témoigne son père :
Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi
Ce pauvre fils ainé attendait qu'on lui donne, et il n’avait pas réalisé que cela lui avait été déjà donné.Comme cas fameuses caroubes, dans le champ.
Mon hypothèse se concluait donc ainsi : les deux frères ont un comportement identique : ils ne vivent que dans l'attente du don, et leur défaut, c'est d’être incapables de saisir de ce qui leur est déjà donné, qui est là, sous leur yeux, sous leurs mains.
Le fils le plus jeune les caroubes, le fils ainé un chevreau pour faire la fête avec ses amis, et les deux en fait, ne saisissent pas immédiatement l'amour prodigue de leur père.
Ma conclusion sera donc fort simple :
Tout nous est déjà donné, et nous attendons qu'on nous le donne car nous ne savons pas le saisir - par un mystère implacable : nous en sommes incapables.
L'invitation proprement spirituelle, mais qui aura de fortes répercussions sur nos vies courantes, si on l'admet, c'est d’apprendre à réaliser ce qui nous est déjà donné.
Je ne veux pas être trop poétique, mais regardez, votre corps, par exemple, ce don d’un creuset de sensations et de possibilités, ce souffle qui vous permet de vivre, de l’amitié parfois, enfin, tout ce qui vous est donné, et que parfois, comme des incapables, on s’obstine à demander, comme le fils le plus jeune qui demande sa part alors qu’il l’a déjà, la suite le montrera.
La morale n'intervient qu'à un stade précis : savoir ce qui nous est vraiment donné, ou ce qui ne serait qu'un piège ou un mirage.
Alors, voici ce premier pas dans la vie spirituelle est indiqué ici :
Ce Dieu, cet amour, que vous demandez sans cesse, vous l’avez, vous n’avez qu’à le réaliser, et puis, vous en saisir,
Comme ces caroubes, très nutritives,
Comme cet accueil du père pour son fils perdu et retrouvé
Comme tous ces éléments, pour faire de votre vie une véritable fête.
Evitons donc de transmettre à nos prières cet esprit qui dirait « donne-moi la part qui me revient », mais à penser plutôt à d’abord ouvrir les yeux avant d’ouvrir la bouche.
AMEN
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